Défis alimentaires, Environnement, restauration hors foyer, Santé publique

En Collectivités & Hôtellerie, 75% des repas sont industrialisés. Sans changement de modèle, il n’y a pas de repas durables; mensonges et vérités.

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« Ce n’est pas dans ses effets qu’on attaque un mal mais dans sa cause« 

François Guizot

Dans un marché en croissance constante, les prestataires de service de repas se plaignent de marges insuffisantes prétendant à toujours plus de subventions 👇

« Aujourd’hui, un prestataire en restauration collective indique que chaque repas préparé est déficitaire de 9%.  En 2015, le service était déjà déficitaire de 3%….un symptôme de dysfonctionnement de l’industrialisation des repas collectifs.

Service de repas en Ecoles publiques bruxelloises. Chiffre d’affaire en hausse, marges insuffisantes…

Un modèle de confection de repas ultra mécanisé, selon les recommandations des industriels afin de réaliser des économies d’échelles 👇

« De ne pas transférer les préparations culinaires pendant tout le cycle de production & de distribution en utilisant des équipements conçus pour être compatibles entre eux, conditionner les portions aux normes standards des équipements (stockages, transports, systèmes de distribution des fours et réchauds des self-services et buffets, chariots de transit, armoires chauffantes, plateaux repas « .

Source: consultance en chaîne de distribution: le libre service en restauration coLLECTVE

….qui sacrifient la qualité et la diversité, suppriment les prérogatives du cuisinier et la raison d’être d’un vrai service 👇

« Le débit moyen de passage devant un self-service est de 7 clients par minute…..des blocages peuvent se produire dans la chaîne en raison de l’hésitation des clients….la diversification des plats est limitée car de trop grandes possibilités de choix augmenteraient les risques d’attente dus à l’indécision du consommateur…etc »

source: consultance en chaîne de distribution:

…et attribuant la charge aux établissements-clients et aux convives 👇

« Le tri et recyclage des déchets, la mauvaise taille des assiettes, utiliser la même assiette pour l’entrée et le plat pricipal ( 2 voyages …), supprimer certains menus; consommateurs qui se servent mal, matières premières (brutes) trop chères et/ou en trop petites quantités, légumes non épluchés, avant transformation trop chers, coûts de distribution ou concurrence interdite avec les marchés publics.., personnel mal formé, ne pas trop demander pour des repas « aidés »…

pacte signé avec les etablissements

L’inflation des matières premières : la cause du déficit, vraiment ? Au déficit dont se plaignent les industriels, s’ajoutent les déficits sociétaux et environnementaux se traduisant dans les établissements-clients par une dévalorisation des emplois: personnel transformé en passeurs de plats toujours plus rapide, en manutentions de matériel pléthorique, pression en cuisine, désorganisation en salle, files d’attentes et Kg d’aliments en attente, réchauffages aléatoires, (temps/température /volumes/conséquences sanitaires et organoleptiques), recettes adaptées aux cuissons standardisées, manque de diversité, absence de bien être (personnel, consommateurs, juniors, seniors, mobilité réduite) et ados leur préfèrant le street food), 20 à 30% de déchets et l’impact sur l’offre et la demande. Détenteurs du système de transformation/distribution, les industriels sont par conséquent, également détenteurs des approvisionnements dont les quantités et la nature des aliments sont adaptés au modèle industrialisé enfermés dans un cercle vicieux de monocultures et élevages intensifs et non pas, à partir de ressources disponibles plus locales, plus diversifiées dont seul un savoir-faire culinaire et son outil de restauration sont capables de mettre en valeur, c’est ainsi que depuis toujours toutes les recettes sont nées et répondent aux besoins.

Pour l’heure, les étapes du processus de production sont déconnectées l’une de l’autre : approvisionnements non synchronisés = surproduction = déchets ; pression sur le personnel en cuisine = manque de qualité = déchets; exposition centralisée de nourriture = surplus = déchets; service inconfortable et refroidissement des assiettes = déchets sur assiette; expliquent les statistiques de déchets 👇

Ecole 200 élèves: 3,4 tonnes de déchets =13’800 repas = 20’000 € de pertes
Collège 500 collégiens, 21 tonnes de déchets = 22’000 repas = 33’000€
Lycée 800 lycéens, 24 tonnes de déchets = 40’000 repas = 70’000 €
Maison de retraite, 30 résidents, 3,2 tonnes de déchets =13’000 repas = 19’000 €
« Des chiffres qui laissent deviner les quantités de déchets dans une Univesité de 10’000 étudiants… une entreprise de 3’000 salariés… ou encore et à titre d’exemple, dans un hôpital…

ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) https://www.ademe.fr/

Depuis des décades, les subventions ne satisfont personne d’autre que les coûts de fonctionnements et d’exploitation d’équipements obsolètes, de stockages, emballages, transports et énergie….des repas industrialisés fructifiants sur un immense marché de consommateurs captifs et marchés publics. Impactant toute la filière, l’enjeu mériterait de reconsidérer le modèle et l’outil de travail 👇

L’outil de restauration n’ayant fondamentalement pas changé, les contraintes logistiques sont relativement lourdes, un personnel important et un matériel conséquent en cuisine sont nécessaires pour absorber le choc du classique coup de feu au moment de la production, celle-ci ne pouvant s’étaler dans le temps,…. »

Maison Alfort. Ecole vétérinaire, sécurité alimentaire ».

La vraie cause du déficit est un déficit technique de l’outil de restauration générant un excès de moyens, une combinaison de matériels énergivores aussi dommageable pour le budget que pour les aliments (trop de chauffe) compliquant la distribution/service de plusieurs centaines de kg de nourriture en un temps T limité, dans les normes techniques strictes et contraintes organisationnelles tout en respectant l’environnemment de consommation des repas 👇

 » Les normes de mise en oeuvre des services de restauration ne se limitent pas à la température des plats à l’instant « T » (fin de cuisson ou du réchauffage) mais sont soumises à la durée, au nombre et la distance de service, sans subir de rupture thermique, et se situant dans une fourchette étroite entre 70 et 63–(maintenir n’est pas cuire). »…… Les inconvénients sont liés au respect, souvent délicat de la chaîne du chaud, dans certainss cas, il s’agit plutôt d’une liaison tiède propice au développement des bactéries…maintenir une température supérieure ou égale à 63°C dépend de la température des plats au départ de la cuisine, des conditions de transport, du type et de la performance des containers utilisés, des délais de consommation, etc. »

Ecole vétérinaire, sécurité alimentaire

Les déchets ne sont « qu’un » des symptômes d’un système dysfonctionnel. Le constat est identique partout (sauf dans des petites unités avec cuisinier aux commandes) également en gestion indépendante ou en hôtellerie, le service reste un élément essentiel des coûts et de la qualité.

Sans marge de manoeuvre en cuisine et au service, les repas réchauffés sont distribués selon un « modèle » né aux USA en 1914 (lorque le personnel en grève, les personnes se sont servies eux-mêmes).

Appliqué à des centaines de Kg, cela revient à des marchandises qu’on laisse sur le quai après un long et coûteux voyage de repas externalisés …..Est-ce aux établissements-clients à subir le blâme? 👉

Un modèle asphyxié techniquement et opérationnellement, un travail non fini, un service centralisé, congestionnant la nourriture de concert dans les fours et réchauds, un service expédié ou en plateaux repas régénérés et maintenus chaud dans des caissons thermiques pendant des heures après de nombreuses et préalables manutentions sont les vraies causes des marges déficitaires et du déficit global.